117ème anniversaire de la fondation de soeurs Orantes de l'Assomption
8.12.1896 - 8.12.2013
7 juin 1919,
veille de Pentecôte
Rectification
écrite par Mère Isabelle après la lecture des chroniques du monastère
Appel à fonder
Quand, par suite des
circonstances, j’eus renoncé à entrer, dans quelques années, chez les dames de
l’Assomption, je restai dans un état fort pénible d’ignorance de la volonté de
Dieu sur moi et mes oraisons étaient pleines d’angoisse quand, tout à coup, dans
la prière, jaillit une parole, une lumière : Notre Seigneur me faisait
comprendre qu’il me destinait à une œuvre nouvelle… C’était si étonnant, si
incompréhensible que j’en fus abasourdie, mais c’était si clair, si net que la
raison jointe à la crainte de l’illusion, pouvaient seules me faire douter. La
si brève parole du divin Maître s’était imprégnée dans mon âme comme un cachet
sur la cire et cette empreinte ne devait plus jamais s’en effacer. Quelque
fussent dans l’avenir mes doutes et mes craintes, je ne pus jamais chercher
sérieusement une voie qui ne fut pas une voie nouvelle, inexistante encore. Je
l’aurais cependant bien voulu ayant horreur de l’inconnu et des voies un tant
soit peu extraordinaires. Mais j’avais alors bien du temps devant moi avant de
réaliser un projet quelconque de vie religieuse et, toute remplie d’étonnement,
je fis la seule chose à faire : j’écrivis au Père Picard en lui soumettant
la parole qui semblait venir d’en-haut et être la manifestation de mon avenir.
J’aurais peut-être été fort
soulagée si le Père m’eut répondu que je n’étais qu’une sotte et que je n’avais
plus à penser à cette billevesée [pensée fantaisiste]. Mais, tout au contraire, le Père m’écrivit de
mettre par écrit, au courant de la plume, tout ce que je pensais. Cela devenait
sérieux. J’écrivis un grand nombre de pages et je les envoyai au Père, pensant
que j’aurais une réponse. Mais le Père garda un complet silence qui ne me
tourmentait d’ailleurs pas, puisque je lui avais tout dit, que rien ne pressait
et que j’étais en sécurité sous l’obéissance.
Un an après, j’allai faire ma
retraite et, grand fut mon étonnement quand le Père me dit que, dans cette
retraite, nous causerions de tout, même de mon grand cahier : - Alors vous
l’avez pris au sérieux ? – Oui, et je vous le dis pour votre consolation,
je m’attendais, je savais d’avance ce que vous m’écririez.
J’étais à l’eau… Mes idées
n’étaient pas traitées d’illusions et il faudrait, tôt ou tard marcher à une
lumière qui, plus j’avançais, devait me sembler ténèbres.
J’en causais quelquefois, mais
plutôt rarement, avec le Père. Par principe, le Père Picard ne concevait pas
une œuvre toute faite dans son esprit. Il pensait, il agissait sous le souffle
du Saint Esprit, il étudiait les circonstances, cherchant à y découvrir les
intentions de Dieu, écoutait patiemment tout ce qu’on lui disait, le pour comme
le contre et, par-dessus tout veillait à ce que l’âme fût fidèle et ne déviât
pas des vues de Dieu sur elle ; et là était le secret de son extraordinaire
ascendant sur les âmes. On voyait en lui l’intermédiaire de Dieu.
Il disait d’ailleurs qu’une
œuvre ne se faisait jamais complètement telle qu’on l’avait d’abord supposée.
Et cela se comprend parce qu’après l’appel réel mais très rapide de Dieu, la
créature y mêle nécessairement son propre travail d’intelligence et
d’imagination. Il est impossible à l’esprit humain de ne pas chercher aux
alentours de la Parole de Dieu ce qu’elle peut bien signifier au juste et cela
n’est pas défendu, au contraire mais ce
qu’on pense n’est pas toujours ce que Dieu veut et c’est souvent très
petit à petit qu’il montre sa volonté par les circonstances humaines, les
réflexions, la sagesse de la direction, la fidélité des âmes, la nature des
vocations.
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