samedi 7 décembre 2013

Mère Isabelle, appel à fonder relecture

              117ème anniversaire de la fondation de soeurs Orantes de l'Assomption
                                         8.12.1896 - 8.12.2013

 
 
7 juin 1919, veille de Pentecôte

Rectification écrite par Mère Isabelle après la lecture des chroniques du monastère


Appel à fonder 

Quand, par suite des circonstances, j’eus renoncé à entrer, dans quelques années, chez les dames de l’Assomption, je restai dans un état fort pénible d’ignorance de la volonté de Dieu sur moi et mes oraisons étaient pleines d’angoisse quand, tout à coup, dans la prière, jaillit une parole, une lumière : Notre Seigneur me faisait comprendre qu’il me destinait à une œuvre nouvelle… C’était si étonnant, si incompréhensible que j’en fus abasourdie, mais c’était si clair, si net que la raison jointe à la crainte de l’illusion, pouvaient seules me faire douter. La si brève parole du divin Maître s’était imprégnée dans mon âme comme un cachet sur la cire et cette empreinte ne devait plus jamais s’en effacer. Quelque fussent dans l’avenir mes doutes et mes craintes, je ne pus jamais chercher sérieusement une voie qui ne fut pas une voie nouvelle, inexistante encore. Je l’aurais cependant bien voulu ayant horreur de l’inconnu et des voies un tant soit peu extraordinaires. Mais j’avais alors bien du temps devant moi avant de réaliser un projet quelconque de vie religieuse et, toute remplie d’étonnement, je fis la seule chose à faire : j’écrivis au Père Picard en lui soumettant la parole qui semblait venir d’en-haut et être la manifestation de mon avenir.

 J’aurais peut-être été fort soulagée si le Père m’eut répondu que je n’étais qu’une sotte et que je n’avais plus à penser à cette billevesée [pensée fantaisiste].  Mais, tout au contraire, le Père m’écrivit de mettre par écrit, au courant de la plume, tout ce que je pensais. Cela devenait sérieux. J’écrivis un grand nombre de pages et je les envoyai au Père, pensant que j’aurais une réponse. Mais le Père garda un complet silence qui ne me tourmentait d’ailleurs pas, puisque je lui avais tout dit, que rien ne pressait et que j’étais en sécurité sous l’obéissance.

 Un an après, j’allai faire ma retraite et, grand fut mon étonnement quand le Père me dit que, dans cette retraite, nous causerions de tout, même de mon grand cahier : - Alors vous l’avez pris au sérieux ? – Oui, et je vous le dis pour votre consolation, je m’attendais, je savais d’avance ce que vous m’écririez.

 J’étais à l’eau… Mes idées n’étaient pas traitées d’illusions et il faudrait, tôt ou tard marcher à une lumière qui, plus j’avançais, devait me sembler ténèbres.

 J’en causais quelquefois, mais plutôt rarement, avec le Père. Par principe, le Père Picard ne concevait pas une œuvre toute faite dans son esprit. Il pensait, il agissait sous le souffle du Saint Esprit, il étudiait les circonstances, cherchant à y découvrir les intentions de Dieu, écoutait patiemment tout ce qu’on lui disait, le pour comme le contre et, par-dessus tout veillait à ce que l’âme fût fidèle et ne déviât pas des vues de Dieu sur elle ; et là était le secret de son extraordinaire ascendant sur les âmes. On voyait en lui l’intermédiaire de Dieu.

 Il disait d’ailleurs qu’une œuvre ne se faisait jamais complètement telle qu’on l’avait d’abord supposée. Et cela se comprend parce qu’après l’appel réel mais très rapide de Dieu, la créature y mêle nécessairement son propre travail d’intelligence et d’imagination. Il est impossible à l’esprit humain de ne pas chercher aux alentours de la Parole de Dieu ce qu’elle peut bien signifier au juste et cela n’est pas défendu, au contraire mais ce qu’on pense n’est pas toujours ce que Dieu veut et c’est souvent très petit à petit qu’il montre sa volonté par les circonstances humaines, les réflexions, la sagesse de la direction, la fidélité des âmes, la nature des vocations.

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