Dom Louis Leloir, O.S.B., moine de Clervaux, DÉSERT ET COMMUNION, 1978, spiritualité
orientale n°26, 343- 347
Restez éveillés
et priez en tout temps,
pour paraître debout
devant le Fils de l'homme, Lc 21, 36
Ce que le moine a en plus du
nécessaire, estimaient les solitaires d’Égypte, ne vient pas de Dieu, mais du
diable. Ils ne gardaient donc pour eux que ce qui était indispensable à leur
subsistance. Conserver plus que le nécessaire, disaient-ils encore, c’est voler les orphelins et les veuves. Ainsi,
au lieu d’accumuler, nos Pères partageaient. Tantôt c’était avec les visiteurs
et les hôtes de passage ; ils avaient, en effet, l’habitude de dresser
aussitôt la table devant eux et de mettre à leur disposition tout ce qu’ils
possédaient. Tantôt c’était avec les plus pauvres de leurs frères. Tantôt,
c’était avec les pauvres de l’extérieur. Il est du reste souvent rappelé que le
pauvre, c’est le Christ.
Tout naturellement donc, les
économies réalisées par le jeûne tournaient au bénéfice des pauvres. Pourtant
il n’est jamais parlé d’un jeûne en vue de faire l’aumône. On ne parle pas non
plus de jeûner davantage en vue de donner davantage. Le jeûne des Pères du désert paraît
avoir été l’occasion de l’aumône plutôt que son but. D’autres soucis sont
souvent évoqués : le souci de maîtriser son corps, d’expier les péchés,
d’imiter le Christ. La première charité que les moines doivent au monde, c’est
celle de leur sainteté, mieux assurée si –par le jeûne – ils veillent à la
discipline d’eux-mêmes, cherchent à ressembler au Christ et à vivre avec Lui.
Si la préoccupation des épreuves et
de la misère matérielle de beaucoup d’hommes doit habiter le cœur des moines,
celle de leur misère spirituelle doit les obséder bien davantage. La question des veilles est à
résoudre avec la même souplesse. Il n’est guère indiqué de peu dormir durant la
nuit, pour dormir ensuite pendant les Vigiles. Pourtant le don de la veille
existe. Dieu l’accorde parfois, plus souvent de manière intermittente, parfois
habituellement. Les pénitences les plus indiquées
pour notre temps sont probablement le souci de la politesse et de la propreté,
une bonne hygiène et une juste mesure, pauvre, mais suffisante de sommeil et de
nourriture, l’effort fourni pour dominer la fièvre dans le travail et se
réserver des temps de silence et de prière, la préoccupation du bonheur
d’autrui et le zèle à lui rendre des services, minimes et grands.
Pour conclure, quelques
lignes de la constitution apostolique de Paul VI, “Repentez-vous“ : À aucune époque la vraie pénitence
ne peut faire abstraction d’une ascèse également physique. Tout notre être, en
effet, corps et âme, doit participer activement à l’acte religieux par lequel la créature reconnaît la sainteté
et la majesté de Dieu. L’Église invite chacun à
accompagner la conversion intérieure de l’Esprit avec la pratique volontaire
des actes extérieurs de pénitence. L’Église insiste avant tout pour que la
vertu de pénitence soit pratiquée dans la fidélité persévérante à nos devoirs
d’état, dans l’acceptation des difficultés inhérentes à notre travail et à nos rapports sociaux,
dans le support patient des épreuves de la vie terrestre, avec son angoissante
insécurité. L’Église invite sans distinction
tous les chrétiens à obéir au précepte divin de la pénitence par des actes
volontaires, en dehors des sacrifices inhérents à la vie quotidienne.
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