mercredi 5 mai 2010

Grégoire de Nysse, sermon sur l'Ascension

Docteur de l'Église de l'Orient,
Grégoire de Nysse (saint),
né à Césaré de Cappadoce vers 335
et mort à Nysse vers 395,
a longtemps hésité entre le monde et l'Église.



Nommé par son frère (Saint Basile) évêque de Nysse,
il finit par s'intéresser,
aux choses de l'esprit et joua
(d'après Skonmadit, fils) un assez grand rôle
au concile de Constantinople (381).

On dit qu'il fut un très mauvais administrateur mais un docteur éminent, une sorte d'autorité en matière d'orthodoxie.


Il a laissé de nombreux écrits contre, entre autres, l'arianisme :
Grande Catéchèse
Discours contre Eunomios
Discours contre Apollinaire
....
Présentation du texte

Cette traduction est la version remaniée par Luc Fritz, Assomptioniste, du texte paru dans la collection “Pères dans la foi” chez Migne (référence complète de ce texte: Grégoire de Nysse, Le Christ pascal, Trad. Ch. Bouchet, coll. “Pères dans la foi”, Migne, Paris 1994).

Ouverture : David augmente la joie de la fête

1. Quel doux compagnon de notre vie sur terre que le prophète David ! Il est là, sur tous les chemins de notre existence, intervient avec discernement dans tous les âges spirituels et participe à chaque étape de notre progression. Il se mêle aux jeux des enfants de Dieu, lutte avec les hommes, instruit la jeunesse et soutient la vieillesse. Il est tout pour tous, l’arme des soldats, l’entraîneur des athlètes, la palestre des gymnastes, la couronne des vainqueurs, la joie des convives ou la consolation funèbre. Rien dans notre vie n’est étranger à sa grâce. Notre prière serait-elle forte sans la participation de David ? Et la fête serait-elle joyeuse sans la joie que lui apporte le Prophète ? Nous pouvons le constater aujourd’hui même : à cette fête, déjà belle pour nous, l’apport du Prophète confère plus d’éclat encore, lorsqu’il ajoute la joie des psaumes qui conviennent au thème de la fête.

Ps 23 (22) : La joie née de la vie de Dieu en soi

Un horizon à atteindre

Dans le premier des psaumes, il te demande d’être la brebis que Dieu mène paître et qui ne manque d’aucun bien (23, 1). Le bon berger y est aussi herbe du pâturage, eau du repos, nourriture, abri, chemin et guide (23, 2) ; il est tout et accorde sa grâce selon ce qui convient.

L’initiation chrétienne

L’Église tire de là cette leçon : il te faut d’abord devenir la brebis du bon pasteur, conduite par une bonne catéchèse vers les pâturages et les sources de l’enseignement, pour être enseveli avec lui dans sa mort par le baptême, sans craindre une pareille mort car ce n’est pas la mort, mais une ombre et une imitation de la mort. Il dit en effet, Si je m’avance au milieu de l’ombre de la mort, je ne craindrai pas ce qui m’arrive comme un mal, car tu es avec moi. Ensuite il te console avec le bâton de l’Esprit (car le Consolateur est l’Esprit) (23, 4). Il dresse la table mystique qu’il a préparée face à celle des démons (cf. 1 Co 10, 21). C’étaient eux qui opprimaient la vie des hommes avec leur idolâtrie. Face à eux voici la table de l’Esprit. Puis il parfume la tête de l’huile de l’Esprit ; il ajoute le vin qui réjouit le coeur (cf. Ps 103, 15) et qui inspire à l’âme cette sobre ivresse, lui faisant oublier l’éphémère pour songer à l’éternel.

La joie de la vie éternelle

Car qui a goûté à cette ivresse-là reçoit l’éternité, au lieu d’une vie tôt terminée, et son séjour dans la maison de Dieu est aussi long que la longueur des jours (23, 6).

Psaume 24 (23) : La joie plus grande de la contemplation du plan de salut de Dieu

Vers une joie plus grande

2. Telle est la grâce dont il nous fait part dans le premier des psaumes. Dans le suivant, il appelle l’âme à une joie plus grande et plus accomplie encore. Expliquons-le, voulez-vous, en reprenant brièvement ce psaume.

a. Le Seigneur est venu pour sauver les hommes

Ce n’est pas impossible

Au Seigneur la terre et tout ce qu’elle renferme (24, 1). Qu’y a-t-il donc d’étrange, homme, que notre Dieu soit apparu sur terre et qu’il ait vécu avec les hommes (Ba 3, 38) ? La terre est sa création et, par là, son oeuvre. Il n’est donc ni curieux ni invraisemblable que le Seigneur soit venu chez lui. Il ne se trouve pas dans un monde étranger, mais dans celui qu’il a lui-même formé, quand il a fondé la terre sur les mers et l’a façonnée de manière à permettre le passage des fleuves (24, 2).

C’était nécessaire.

Pourquoi sa présence parmi nous ? Pour te retirer des abîmes du péché et te conduire sur la montagne de la royauté (24, 3), si tu utilises ton état vertueux comme un char pour cette montée. Car on ne saurait accéder à cette montagne sans être accompagné des vertus : il faut des mains innocentes, loin de la souillure du mal, il faut aussi un coeur pur, sans tourner son âme vers les idoles ni vouloir tromper son prochain (24, 4). La bénédiction est la récompense de cette ascension. Le Seigneur donne la miséricorde qui lui est réservée (24, 5). Telle est la race de ceux qui le cherchent, qui se hissent à cette hauteur par la vertu et cherchent la face du Dieu de Jacob (24, 6).

b. La descente et l’exaltation du Seigneur

La descente du Seigneur

La suite du psaume est peut-être plus sublime encore que l’enseignement évangélique. L’Évangile, en effet a raconté la vie et la conduite du Seigneur sur la terre, mais ce sublime prophète est sorti de lui-même, comme pour ne pas être entravé par le poids de son corps, et s’est mêlé aux puissances supercosmiques. Il nous rapporte leurs paroles quand elles ont accompagné le Maître lors de sa descente1 et ont ordonné aux anges qui entourent terre - à qui a été confié la vie humaine - d’ouvrir les portes en disant : Chefs, levez vos portes et vous, portes éternelles, exhaussez-vous et le Roi de gloire entrera (24, 7).

Mais comme celui qui contient tout en lui, où qu’il se rende, se rend semblable à ceux qui le reçoivent - car il ne devient pas seulement homme avec les hommes, mais tout logiquement, venant chez les anges, il condescend à leur nature -, à cause de cela les portiers demandent de leur indiquer Qui est ce roi de gloire ? C’est pour cette raison que les puissances célestes leur répondent : celui qui est fort et puissant au combat (24, 8) ! celui qui va s’attaquer au dominateur de la nature humaine captive et qui va renverser le détenteur du pouvoir de la mort, pour que, après la destruction de ce dernier ennemi (cf. 1 Co 15, 26), l’humanité soit rendue à la liberté et à la paix.

L’exaltation du Seigneur

Puis [le psaume] reprend les mêmes paroles (24, 9), car il est accompli maintenant le mystère de la mort, elle est remportée la victoire sur les ennemis, elle est dressée comme un trophée la Croix et une nouvelle fois Il est monté sur les hauteurs, celui qui emmène la captivité en captivité, celui qui a donné la vie et le royaume, ces dons excellents aux hommes (cf. Eph 4, 8 ; Ps 68, 19). Et il faut que de nouveau les portes célestes soient ouvertes pour lui. Nos gardiens l’escortent à leur tour et ordonnent aux portes célestes de s’ouvrir pour lui, afin qu’ à nouveau il soit glorifié en elles.

Mais il n’est pas reconnu celui qui s’est revêtu de la robe crasseuse de notre humanité et dont le rouge des vêtements (cf. Is 63, 1) vient du pressoir des maux humains. Aussi la question est-elle posée à ceux qui l’accompagnent : Qui est ce roi de gloire ? Leur réponse n’est plus alors : Le fort, le héros au combat, mais le Seigneur des puissances (24, 10), celui qui s’est acquis le pouvoir sur l’univers, qui a récapitulé toute chose en lui (cf. Eph 1, 10), qui tient en tout la primauté (cf. Col 1, 18), qui a restauré toute chose dans le sens de la première création (cf. Ac 3, 21) ; c’est lui, le Roi de gloire.

Exhortation : Imitez le prophète David

Voyez comment David a rendu cette célébration plus douce pour nous : sa propre allégresse se mêle à la joie de l’Église. Imitons donc, nous aussi, le Prophète, autant que nous pouvons l’imiter, dans son amour de Dieu, dans la bonté de sa vie, dans sa patience à l’égard de ceux qui le haïssent, afin que l’enseignement du Prophète montre comment vivre selon Dieu sous la conduite de Jésus-Christ notre Seigneur, à qui appartient la gloire pour les siècles des siècles. Amen.

http://www.gregoiredenysse.com/?page_id=73

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