Si le but immédiat d’une lecture spirituelle est d’acquérir des connaissances religieuses, son but final est d’alimenter l’oraison. Et plus le livre ouvre l’âme au contact de Dieu, soit par son contenu, soit grâce à l’ambiance de silence, de liberté de cœur et de gratuité dans laquelle se fait la lecture, plus celle-ci sera féconde.
Or du point de vue du contenu, la Bible est dans une situation privilégiée. Parole de Dieu, elle nous met immédiatement en contact avec lui ; si nous la lisons dans un esprit d’accueil, d’écoute et de docilité, l’Esprit de Dieu nous y remue et nous y blesse. La Bible ne s’occupe du reste que de Dieu, ou du monde vu dans sa relation vis-à-vis de Dieu, ou de l’homme pour lui apprendre comment servir Dieu ; la lecture de la Bible est donc bien une lectio divina, une lecture qui plonge en Dieu. Aussi le moine en fera-t-il ses délices, répétant et surtout vivant ces paroles de Jérémie, 15,16 : « Quand tes paroles se présentaient, je les dévorais ; ta parole était mon ravissement et l’allégresse de mon cœur ».
Présent dans l’Eucharistie, Dieu l’est aussi dans la Bible, autre pain de vie ; comme l’Eucharistie, la Bible provoque à l’amour et à la prière ; elle en sera l’aliment et le soutien, après en avoir été le point de départ.
« Du champ vient la joie de la moisson ; de la vigne les fruits qui nous nourrissent et de l’Ecriture la doctrine vivifiante »,
Isaac d’Antioche (+460-461).
Le champ donne la moisson une fois l’année ; la vigne ne fournit qu’une vendange par an, tandis que la doctrine salutaire jaillit de l’Ecriture aussi souvent qu’on la lit. Le champ une fois moissonné, arrête et se repose ; de même la vigne, une fois la vendange faite, n’a plus d’utilité ; la Sainte Ecriture, au contraire, même si on la moissonne journellement, donne toujours des épis à ceux qui la scrutent. Allons donc à ce champ jouir de ses sillons et cueillir ses épis vivifiants.
Dom Louis Leloir, o.s.b., moine de Clervaux, Désert et communion, témoignage des Pères du Désert recueillis à partir des Paterica arméniens, spiritualité orientale, N° 26, collection Bellefontaire, extrait 272-275.
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