lundi 4 mai 2009

St Grégoire le Grand, Accueillir les événements est une ascèse

Paroles de Dieu, amour et Esprit-Saint chez Saint Grégoire le grand, Patrick CATRY, o.s.b., éditions de l’abbaye de Bellefontaine, Vie monastique n°17, 55-57

On s’interroge souvent aujourd’hui sur l’ascèse pour en récuser certaines formes dites traditionnelles. Il y a l’ascèse que l’homme s’impose lui-même, et il y a d’autre part cette immense ascèse qui consiste à accueillir les événements. La vie des justes est remplie d’adversités : c’est une constatation, mais c’est aussi une nécessité, affirme Saint Grégoire ; nous ne pouvons retourner aux joies éternelles que par les maux temporels. Ces maux temporels ne sont pas un désavantage ni un malheur ultime ; bien au contraire, l’adversité est un gain pour ceux qui sont bien disposés : les adversités sont fâcheuses mais utiles ; elles sont une aide.

Personne ne peut être parfait s’il n’a supporté patiemment le mal que lui infligent les hommes. Pas d’Abel sans Caïn ; pas de Joseph sans ses frères qui le vendent comme esclave, etc. Ceux-là sont vraiment bons qui peuvent garder leur bonté même au milieu des méchants. Pour que la vertu de Job arrivât à son comble, il était nécessaire qu’il souffrît de la part des hommes. La vertu de patience ne peut trouver à se manifester quand tout va pour le mieux. Est patient celui qui sait garder la rectitude de son espérance et louer Dieu même quand il est accablé par l’adversité.

Dans l’épreuve, l’homme apprend ce qu’il vaut en vérité. L’épreuve nous met en question. Ce n’est plus tellement l’homme qui interroge Dieu sur le bien-fondé de l’épreuve qui lui advient ; c’est l’épreuve qui le scrute et le soupèse. Personne ne sait ce qu’il vaut si ce n’est par l’épreuve. C’est alors qu’on voit en vérité la mesure de grâce que chacun a reçue. L’épreuve démolit la façade et manifeste l’intérieur. On y apprend combien on a progressé par la grâce de Dieu et combien on est faible par soi-même. L’épreuve nous éclaire et sonde notre cœur.

Les épreuves, en nous rabaissant à l’extérieur, nous rendent prudents à l’intérieur pour garder dans le silence les dons reçus… L’adversité a le pouvoir de transformer l’homme, de le renouveler intérieurement alors que l’extérieur pâtit ; et plus il souffre au dehors, plus il est comblé au-dedans des lumières de la vertu.
‘Encore que l’homme extérieur en nous s’en aille en ruines, l’homme intérieur se renouvelle de jour en jour’, 2 Cor 4, 16. L’adversité fortifie et l’expérience de la souffrance donne une certaine sensibilité pour compatir en vérité aux maux du prochain.

L’épreuve tend à désarçonner celui qu’elle atteint. Aussi les saints cultivent-ils une certaine prudence quand tout leur sourit, au temps de la paix et de la tranquillité. N’étant attachés à rien de ce qui est terrestre, soumis vraiment à Dieu seul, ils ne sont pas surpris par les épreuves. Ne se laissant pas corrompre par la prospérité, ils ne sont pas non plus abattus par l’adversité.

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